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Fil d'Ariane

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Cibler l’immortalité des cellules cancéreuses

Une caractéristique fondamentale partagée par les cellules cancéreuses est leur capacité de se répliquer indéfiniment—un processus fortement influencé par la régulation épigénétique. Et si nous pouvions désactiver l'immortalité des cellules cancéreuses, les ramenant à leur cycle de vie normal avec un potentiel de réplication limité? Il s'avère que les chercheurs ne sont peut-être pas si loin d’y parvenir. Des médicaments ciblant les mécanismes épigénétiques impliqués dans l'immortalité des cellules cancéreuses sont actuellement en développement.

  • cancer cell

 

Les cellules somatiques ont un nombre limité de divisions cellulaires, connu sous le nom de limite de Hayflick. Cette limite est contrôlée par le raccourcissement des chromosomes de la cellule. Après chaque cycle de division cellulaire, les extrémités des chromosomes - appelés télomères - se raccourcissent légèrement. Les chromosomes atteignent alors une longueur critique qui indique à la cellule d’arrêter de se diviser. C'est cette limite que les cellules souches cancéreuses doivent contourner pour donner naissance à des tumeurs.

La formation de cellules souches cancéreuses

Pour créer des cellules souches cancéreuses, les cellules somatiques doivent acquérir des mutations qui créent d'abord des cellules cancéreuses, puis d'autres mutations qui favorisent l'acquisition de propriétés de type cellule-souche telles que l'auto-renouvellement. Alternativement, les cellules souches peuvent acquérir des propriétés telles qu'une prolifération incontrôlée. Ainsi, une cellule souche cancéreuse est d’abord formée, puis elle doit acquérir des propriétés de type cellule-souche afin de propager le cancer.

Des facteurs épigénétiques tels que les protéines du groupe Polycomb contribuent à la capacité des cellules souches cancéreuses de s'auto-renouveler en inhibant l'expression des suppresseurs de tumeurs. La méthylation de l'ADN est diminuée à certains gènes oncogéniques , mais est augmentée à des gènes suppresseurs de tumeurs, ce qui inhibe leur expression. Les voies de signalisation cellulaires peuvent également être perturbées, affectant alors les caractéristiques des cellules cancéreuses semblables à celles des cellules souches.

Les cellules souches cancéreuses doivent également développer des mécanismes pour maintenir leurs télomères, et ces mécanismes sont des cibles thérapeutiques prometteuses pour les thérapies contre le cancer. La méthode la plus courante est la réactivation du gène codant pour l'enzyme télomérase, qui répare les télomères après chaque cycle cellulaire. Dans les cellules somatiques non cancéreuses, le gène télomérase est réprimé épigénétiquement, mais la façon dont il est réactivé dans les cancers n'est pas toujours claire.

L’épigénétique de l'auto-renouvellement des cellules cancéreuses

Certains gènes peuvent être réprimés par la présence de nucléosomes sur leurs promoteurs. Cet état réversible permet aux gènes d'être réactivés en cas de besoin. La protéine d'histone de liaison H1.0 est importante pour la stabilisation de nucléosomes sur les promoteurs d’un gène. H1.0 contribue également à la répression de modificateurs épigénétiques, tels que certaines protéines du groupe Polycomb, qui sont impliquées dans l'auto-renouvellement des cellules cancéreuses. Ainsi, H1.0 stabilise les informations épigénétiques en réduisant le renouvellement des histones et en aidant à réguler l'expression des modificateurs épigénétiques.

Les cellules tumorales qui s’auto-renouvèlent répriment fréquemment l'expression de H1.0. Ceci est une caractéristique souvent retrouvée dans les cancers agressifs est est indépendante de d’autres mutations. H1.0 est ciblé à de nombreux promoteurs différents. Les gènes liés à l'auto-renouvellement riches en AT sont particulièrement intéressants parce que lorsque H1.0 est réprimé, ces gènes sont considérablement sur-exprimés. Ceci expliquerai pourquoi la répression de H1.0 peut entraîner des cancers avec un degré élevé d'auto-renouvellement.

Cibler l'auto-renouvellement des cellules cancéreuses

Compte-tenu de l'importance de H1.0 dans la régulation des gènes d'auto-renouvellement, la restauration de l'expression de H1.0 peut aider à traiter certains cancers agressifs qui sont caractérisés par une répression de H1.0. Récemment, un criblage de 4000 molécules a été réalisé afin de trouver des médicaments thérapeutiques potentiels. Parmi celles-ci, 133 molécules ont induit l'expression de H1.0 dans des lignées cellulaires cancéreuses humaines. L'une de ces molécules, Quisinostat, a été testée sur plusieurs lignées de cellules cancéreuses distinctes et a produit la restauration de l’expression de H1.0 la plus cohérente entre différents cancers.

Quisinostat a diminué la prolifération des cellules cancéreuses, l'auto-renouvellement à long terme et la rechute de la maladie dans un modèle de souris. Ces résultats sont prometteurs pour le traitement des cancers H1.0 chez les patients humains, car Quisinostat est un agent thérapeutique relativement connu et qui est déjà utilisé pour les mélanomes et les carcinomes hépatocellulaires.

Bien que ces études constituent une incursion passionnante dans le domaine du traitement des cellules cancéreuses en restaurant la fonction épigénétique, il est important de noter que ces résultats n'ont pas encore été reproduits chez des patients humains.